À Venise, le pont des Soupirs a conduit pendant des siècles les condamnés vers leur geôle. Les fenêtres grillagées leur permettaient de contempler une dernière fois l’activité de la ville. 300 ans plus tard, on croirait qu’une vétérinaire danoise a revu les plans de l’architecte italien. Préoccupée par le bien-être des truies qui arrivent à l’abattoir, elle a mené une étude qui suggère, entre autres, de ne plus recourir aux rampes ajourées. La vue d’autres truies à l’extérieur du groupe leur occasionnerait un stress néfaste.
Responsable du bien-être des 5 000 truies qui sont abattues chaque semaine à l’usine de la Danish Crown de Skærbæk, Sanne Weinreich Christensen a étudié d’autres solutions pour éviter l’agitation inutile des animaux qui débarquent à l’abattoir. Pour amener les truies de réforme jusqu’à leurs enclos, la vétérinaire préconise que l’on ne recoure pas à des couloirs qui ont des angles à 90 degrés. Ce type d’aménagement empêche les animaux de voir ce qui les attend et les amène parfois à vouloir rebrousser chemin vers le camion.
Dans la thèse de maîtrise qu’elle a menée au département de sciences animales de l’Université Aarhus, Mme Christensen a également pensé au personnel de l’abattoir. Pour éviter que les manutentionnaires soient forcés d’aller à contre-courant des truies restées près du camion, elle a prévu une plateforme séparée qui longe le couloir des truies. En plus de ne pas perturber le mouvement des bêtes, cela facilite le travail des employés. Mais ça, l’architecte du pont des Soupirs y avait déjà pensé. Selon qu’ils empruntaient le couloir gauche ou droit, les condamnés ne pouvaient jamais se voir ni se parler!