Jennifer Hayes, l’art de bien faire son beurre

Jennifer Hayes, l’art de bien faire son beurre

L’art de bien faire son beurre

Elle a été bercée par la Baie-des-Chaleurs, a grandi près du ruisseau qui descend des Chic-Chocs pour se jeter dans l’anse de Shigawake. Elle est la troisième génération de la famille Hayes à s’occuper d’une terre où se mélangent les effluves de foin, de vaches laitières et de homards. Sur cette ferme laitière et de bovins de boucherie — la plus à l’est du Québec continental ! — Jennifer Hayes aurait pu mener une vie bien routinière dans ce village de quelque 300 âmes. Une existence réglée par le chant du coq, les cloches des églises St James United et St Paul Anglican, le meuglement des vaches et les coups martelés à la forge Gagnon.

Mais voilà, Jennifer Hayes est du genre entrepreneur. Tant et si bien que le 4 janvier dernier, la ministre canadienne de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire l’a nommée à la présidence de la Commission canadienne du lait (CCL) pour un mandat de quatre ans. Une première femme à la tête de cette société d’État.

Un beau défi pour cette toute fraîche quinquagénaire qui souhaite gérer les turbulences qui ne manquent pas de secouer l’industrie du beurre et de la crème. Les changements climatiques, les adaptations à la pandémie, les nouvelles habitudes chez les consommateurs et les modifications aux accords de libre-échange, Jennifer est prête à tout baratter pour mieux positionner l’industrie, assurer sa durabilité et coordonner la gestion des approvisionnements de lait de transformation au Canada.

À la tête d’une équipe de 80 professionnels rompus à l’exercice d’agir rapidement pour répondre aux besoins du secteur, la Gaspésienne anglophone a acquis une très bonne compréhension des enjeux. Détentrice d’une maîtrise en administration des affaires de l’Université Concordia, Jennifer a défendu les intérêts régionaux dans le développement des secteurs laitier, bovin et agricole au sein de l’Union des producteurs agricoles.

Dès 2012, elle agissait à titre d’agente de revitalisation pour la municipalité régionale du comté de Bonaventure. Ceux et celles qui l’ont vue aller savent que Jennifer a une excellente capacité de communication, d’analyse et de synthèse, qu’elle sait établir et entretenir des relations d’affaires. Au cours des quatre dernières années, elle a agi à titre de commissaire au sein de la Commission canadienne du lait.

 « Les gens pensent que nous sommes là uniquement pour défendre les producteurs, ce qui n’est pas du tout le cas. On gère le système afin que l’industrie soit durable. On veut que le consommateur ait accès à une bonne gamme de produits abordables et accessibles. On souhaite que les transformateurs puissent innover et développer de nouveaux produits. Quant aux producteurs, on veille à ce qu’ils aient un bon retour sur leur investissement. »

Depuis 2017, ses deux filles qui ont aujourd’hui 10 et 13 ans ont dû se résoudre à partager leur mère avec la CCL, mais la COVID leur aura été une alliée inattendue. Le confinement et les restrictions ont forcé Jennifer à diminuer ses allers-retours entre la Gaspésie et Ottawa. Les réunions Zoom ont pris plus de place sur la ferme PineCrest, ce qui n’a pas été pour déplaire à ses enfants, à son conjoint et à son père, ancien maire du village et propriétaire d’une entreprise de compostage à base de résidus de poisson.

Pandémie ou pas, Jennifer Hayes continuera de consulter tant les producteurs, les restaurateurs, les détaillants, les distributeurs, les transformateurs que les consommateurs pour veiller à ce que l’industrie tire son épingle du jeu. Après tout, tout ce beau monde a bien besoin de mettre du beurre dans les épinards !

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