Éric Paquet, dompteur d’algorithmes

Éric Paquet, dompteur d’algorithmes

Dompteur d’algorithmes

C’est à la vitesse grand V que les nouvelles technologies inondent toutes les sphères de l’activité humaine. Le déluge de térabits qu’elles engendrent est tel que l’on peine à harnacher les milliards de données qui proviennent de toutes parts. Le monde de l’agriculture ne fait pas exception. Munis de téléphones intelligents, de drones, de caméras vidéo et d’une panoplie d’autres appareils greffés aux tracteurs et à la ferme, les producteurs en génèrent une quantité astronomique, parfois sans même s’en rendre compte. 

Dans le domaine bioalimentaire, pour favoriser la production et améliorer le bien-être des animaux, il est devenu incontournable d’exploiter ces mines de renseignements. Éric Paquet, professeur en génomique et en données massives à la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’alimentation met tout son génie pour récolter et dompter ces masses d’informations qui dépassent largement les capacités d’analyses de nos neurones. Il cartographie toutes les données disponibles, depuis le champ du producteur jusqu’à l’étape de la transformation.

Dompter est le mot juste, car Éric se sert de mégaordinateurs et de programmes informatiques comme d’un fouet pour entraîner des algorithmes complexes à se servir des mégadonnées. Cela permet, par exemple, à ces bestioles mathématiques d’apprendre à détecter automatiquement des pathologies ou surveiller le comportement des animaux en temps réel, ce qu’un humain n’est souvent pas en mesure de diagnostiquer. 

 « Dans les cinq prochaines années, nos étudiants maîtriseront ces technologies. En tant qu’agronomes, ils se serviront de ces données pour conseiller les producteurs. Sur un horizon de dix ans, nous voudrions pouvoir contrôler les animaux sur un cycle complet de production pour être capable d’intervenir de façon prédictive contre des stress et des problèmes, faire un suivi en temps réel sur les conditions d’élevage. On veut développer des outils pour traiter de plus en plus de données. Ce sera moins intrusif. À partir d’échantillons de lait, par exemple, on pourra déceler des pépins de santé. »

Bardé de diplômes impressionnants et fort d’une expertise en bio-informatique, en biologie des systèmes, en chronobiologie et en apprentissage machine appliquée, Éric Paquet s’était d’abord intéressé à la médecine humaine. Se servant de la génomique pour guider le traitement des patients, il a, entre autres, contribué au développement d’outils d’apprentissage machine en médecine de précision appliquée au cancer du sein et du colon.

Qu’est-ce qui l’a amené à sauter dans l’enclos des bêtes ? L’homme de 41 ans a trouvé que les impacts des recherches dans le domaine animal étaient plus directs et monétairement moins prohibitifs.

Remarquez que ceux et celles qui le connaissent depuis toujours n’auront aucunement été surpris de le retrouver dans les hautes sphères de la technologie au bénéfice des animaux et des producteurs. 

En grandissant sur une ferme de Broughton, près de Thetford Mines, le petit gars s’est avéré un « patenteux » né. Sauf les dindes, les poulets et les cochons qu’élevaient ses parents, il démontait et étudiait tout ce qui lui tombait sous la main. Cela comprenait les ordinateurs qui, d’aussi loin qu’il se souvient, ont toujours été présents à la maison. Il n’a d’ailleurs pas attendu l’adolescence avant de s’adonner à la programmation. Il faut dire qu’il a un faible pour les mathématiques.

Ça tombe bien parce que les algorithmes qu’il mange aujourd’hui comme des amuse-gueule permettront bientôt à ses supers ordinateurs de développer un apprentissage et de détecter un problème de santé au moindre mouvement de l’oreille d’un veau !

Tout cela augure bien pour la révision du programme d’agronomie de l’Université Laval qui sera offert aux étudiants dès septembre 2022. Ceux et celles qui souhaiteront baigner dans les analyses de données seront servis.

En lire plus

Geneviève Gagnon, la fourmi du bonheur croustillant
Alexandre Dufour, le fier Charlevoyou