
Le franchisseur de murs
Au Québec, 500 000 personnes travaillent au sein de quelque 70 000 entreprises spécialisées dans le domaine de l’agroalimentaire. Cette activité ne fait pas que nous nourrir. Le secteur représente 7% de notre PIB et son impact économique est évalué à plus de 30 milliards de dollars. Mais pour prospérer dans un monde globalisé, les entrepreneurs de l’industrie alimentaire sont condamnés à se retrousser les manches et à faire preuve de plus en plus d’imagination et de créativité. André Michaud en est absolument convaincu.
Président d’Agro Québec depuis dix ans, l’homme dans la cinquantaine fait du coaching en développement d’affaires et stratégique. Il sait fort bien que les producteurs et les transformateurs de chez nous sont des gens passionnés par leurs produits. Hélas, il ne suffit pas de concocter des denrées de qualité. Il faut aussi savoir bien se vendre. Pour M. Michaud, c’est une fois le produit au point que le travail commence.
Depuis lors, le fruit de son labeur n’a cessé de pousser comme tomates au soleil. Plus de 350 personnes travaillent aujourd’hui sur neuf sites de production dans les Laurentides, en Montérégie, au Saguenay, en Mauricie, dans Charlevoix, en Estrie, à Québec et en Gaspésie. Et c’est sa conjointe Caroline Dalpé qui, à titre de directrice générale, orchestre l’ensemble des opérations de ces jardins vitrés.
Fort de son expertise d’une quinzaine d’années au niveau de la vente au détail, il a vite compris que plusieurs produits ne sont pas prêts à aller à la conquête des grands joueurs de la distribution alimentaire tels Métro, Sobeys et Loblaw, sans parler des géants comme Walmart et Costco. Tantôt, c’est une lacune au niveau de l’emballage, du message ou de l’image de marque (branding) qui posent problème, tantôt c’est la logistique de distribution qui est déficiente.
Pour aider les producteurs et les transformateurs qui souhaitent franchir le mur des distributeurs pour pouvoir atteindre les consommateurs, Agro Québec développe et propose des stratégies d’affaires structurées qui répondent aux réalités propres de chacune des entreprises qui recourent à ses services.
«La brèche dans la gestion de l’offre était prévisible. L’avenir n’est pas au lait de base. Nos entreprises n’ont d’autre choix que de développer des produits de plus en plus de niche, des produits à valeur ajoutée. On a de l’électricité, de l’eau, de l’expertise, du territoire. Nous nous sommes donnés d’excellentes mesures de salubrité des aliments, de traçabilité, de qualité, de normes environnementales. Il faut s’en servir pour maintenir notre longueur d’avance et contrer l’arrivée de produits de consommation courante.»
André Michaud soutient qu’on ne peut pas concurrencer le Mexique ou le Brésil. Selon lui, l’avenir est
à l’agriculture biologique et c’est la technologie qui permettra de développer et d’exporter nos produits
aux États-Unis.
Bien sûr, pour tirer leur épingle du jeu, les entreprises doivent investir des sommes conséquentes. M. Michaud ne réclame pas des gouvernements qu’ils donnent de l’argent. Il espère surtout que le prochain ministre de l’Agriculture comprendra l’importance de l’accès au financement pour les entreprises agricoles. D’ailleurs, avec sa division média, Agro Québec compte bien marteler le message, sans oublier de parler de la relève agricole, du rôle des femmes dans le secteur de l’agriculture et de bien d’autres préoccupations. Après tout, le secteur agroalimentaire est, ni plus ni moins, un véritable tracteur en matière de développement économique.